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C’était tout, absolument tout. Il en arrivait sans transition aucune à cette scène qui nous fit aussi savants que lui ; cette scène où Mme Thérèse lui donna le portefeuille contenant vingt billets de mille francs.

La forme même des recommandations qui accompagnèrent ce dépôt disait assez à quel point Roland était étranger aux secrets de sa mère.

Il ne savait rien, et en ce moment suprême où elle avait besoin d’un messager sûr, elle ne lui disait rien encore, sinon qu’en échange des vingt billets de mille francs, Me Deban, notaire, devait placer entre ses mains un acte de naissance, un acte de mariage, un acte de décès, tous trois à ce noble nom dont chaque lettre restait gravée dans le souvenir de Roland : « Raymond Clare-Fitzroy-Jersey, duc de Clare ».

Laborieusement, péniblement, après mille doutes et s’accusant mille fois de folie, Roland avait mis deux années entières à repousser, et par conséquent à établir en lui cette pensée que, pour payer ces trois pièces au prix de ses derniers vingt mille francs, — conquis, Roland ne savait par quel sacrifice, — il fallait que ces mystérieux papiers eussent trait étroitement à elle et à lui-même.

Or, la veille du jour où nous sommes, Roland avait reçu une lettre dont l’enveloppe portait le nom de M. Cœur, mais qui à l’intérieur était ainsi conçue :

« Monsieur le duc,

» Deux personnes qui vous connaissent mieux que vous ne vous connaissez vous-même, auront l’honneur de se présenter chez vous demain à deux heures l’après-midi. Faites en sorte d’être libre et de les recevoir sans témoins. »

Il n’y avait pas de signature.