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de la justice !

La garde s’arrêta sur ce mot.

La mère Françoise avait les yeux baissés et réfléchissait.

— Il n’a prononcé aucun nom ? demanda-t-elle.

— Marguerite… commença la Davot.

— J’entends aucun nom qui puisse servir d’indication.

— Attendez !… J’ai une fameuse mémoire, mais le manque de sommeil… Ah ! j’ai bien gagné ce qu’on a fait pour moi, oui !… Il a dit un nom.

— De Clare, peut-être ?

— Pour ça, non… C’était comme Charleroy…

— Fitz Roy ?

— Non… pas Fitz Roy… Palevoy, Malevoy… et il a causé d’une étude de notaire… Ce doit être une histoire à faire frémir, bien sûr !

Sans mot dire, la vieille religieuse lui fit signe de repasser le seuil et la suivit dans le corridor. Elles descendirent ensemble au parloir où une sœur veillait en effet.

La sœur dit, pendant qu’elles s’approchaient du lit sans bruit :

— Le voilà plus calme. Il avait un mauvais rêve. Quel beau jeune homme ! et ne croirait-on pas qu’il est en santé ?

Il y avait trois jours que la mère Françoise d’Assise n’avait visité le blessé. Elle fut frappée du changement qui s’était opéré en lui. La fièvre contribuait sans doute à ces vives couleurs qui animaient son visage, mais la fièvre ne pouvait tout faire et la sœur n’exagérait point ; on eût dit un beau jeune homme en pleine santé.

Comme toujours, la mère l’examina attentivement et longuement. Pendant qu’elle avait l’œil sur lui, il fit un brusque mouvement : un mouvement vigoureux et facile qui le retourna à demi sur sa couche.

— Voyez ! s’écria la garde avec un triomphe. Il cachait son jeu !