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— Ma mère, je vous remercie. Si ce jeune homme vient à recouvrer l’usage de la parole, à quelque heure que ce soit du jour ou de la nuit, je vous prie de me faire prévenir.

— Votre volonté sera faite, vénérable mère, répondit la supérieure.

La vieille religieuse fit un pas pour entrer, mais elle s’arrêta et dit encore :

— Ma mère, la bonté de Dieu peut m’accorder une grâce qui me tient fort au cœur. Je voudrais un Pater et un Ave pour moi, à la prière de ce soir.

— Vous l’aurez, vénérable mère.

— Soyez bénie, sœur supérieure, dit alors la vieille religieuse en changeant de ton et avec un geste de fière protection : Je n’ai plus besoin de vous.

La supérieure croisa ses deux mains sur sa poitrine, salua respectueusement et se retira.

La mère Françoise d’Assise, ayant fermé la porte de sa cellule, plia ses deux genoux roidis avec effort et les mit sur le carreau nu. Elle pria. Quand son oraison fut achevée, elle tira de son sein l’objet que la supérieure n’avait pu voir. C’était la miniature, dont la place restait vide au-dessous du bénitier armorié.

La miniature reprit son lieu, après que la vieille religieuse l’eut effleurée de ses lèvres froides.

Puis elle ouvrit le petit meuble où étaient ses livres de dévotion, pour y prendre du papier, une plume et de l’encre. Elle s’assit. Elle écrivit d’une main lente et lourde, mais ferme encore :

« Monsieur mon neveu,

» Je désire vous voir demain, sans faute. Que Dieu soit avec vous.

 » Rolande Stuart de Clare,
 » en religion :
 » Sœur Françoise d’Assise. »

Elle mit l’adresse :

« À Monsieur
 » le général duc de Clare,

» pair de France, en son hôtel, à Paris. »