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neur qui lui dit :

— De quoi diable viens-tu te mêler, Marguerite ?

Le bon Jaffret se rapprochait déjà de la porte de sortie.

— Je viens pour affaires, répliqua la belle fille. Que personne ne sorte !

Elle s’assit.

La colère faisait trembler les lèvres de Comayrol.

— Nous ne sommes pas très galants, dites donc ! gronda-t-il entre ses dents serrées, et avec une gaillarde de votre espèce, on ne prend pas de gants beurre frais…

— Asseyez-vous, fit-elle.

Comayrol, au lieu d’obéir, promena autour de la table un regard qui voulait dire :

— Si on la jetait par la fenêtre !

Elle répondit à ce regard, comme s’il se fût traduit par des paroles :

— Je suis entrée par la fenêtre et je sortirai par la porte.

— Comprenez donc, ajouta-t-elle d’un ton de bonhomie qui affirmait son absolue confiance en elle-même. J’ai pris la peine de casser un carreau et de faire toutes sortes de folies pour savoir au juste ce qui se disait ici.

— Vous avez entendu ?… commença le maître-clerc dont le regard âpre se faisait sérieusement menaçant.

— Tout, l’interrompit Marguerite. Vous avez bien parlé, Monsieur Comayrol. Présentez-moi donc à M. Beaufils, l’ambassadeur de la maison Lecoq.

— Vayadioux ! grinça le maître clerc qui n’en arrivait aux jurons de terroir que dans les grandes gaîtés ou dans les grandes colères, nous n’avons rien dit qui puisse nous compromettre, et tu vas la danser, ma fille !

Mais M. Beaufils dessina de la main un geste pacificateur.

— On ne peut pas savoir, murmura-t-il. Mademoiselle est une bien belle personne… mais là, tout à fait, parole d’honneur !

— Vous ne la connaissez pas… commença Comayrol.