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DE L’HISTOIRE DE LA MUSIQUE

nombre de cordes dont plusieurs sont accordées à l’unisson pour chaque note ; on les fait résonner en les frappant avec deux baguettes légères et flexibles, terminées à l’une des extrémités par une espèce de tête arrondie. C’est cet instrument qui, ayant été introduit en Europe par les Croisés, a pris le nom de tympanon. Long-temps après, on en fit le clavicorde en y appliquant la mécanique. Tout porte à croire aussi que le zamr des Arabes, aux sons rauques et criards, est devenu le hautbois européen, après qu’on l’eut transporté chez nous de la Syrie ou de l’Égypte. Il est bien singulier que toutes ces origines aient échappé aux investigations des nombreux historiens de la musique.

Si nous avons beaucoup emprunté à l’Orient pour le goût des ornemens de la mélodie et pour les instrumens de musique, par compensation, nous lui avons fait connaître le système des instrumens à archet ; car l’archet est originaire de l’Occident. Après avoir passé de l’Italie dans la Grèce, la viole a été transportée dans l’Asie mineure, puis dans la Perse et dans l’Arabie. Elle y est devenue la kemangeh roumy, dont on a fait ensuite diverses variétés, en leur donnant un caractère oriental. Le rebâb, imitation grossière du même système, a été long-temps après rapporté en Europe par les Croisés, y a pris le nom de rubebbe, et enfin est devenu le violon rustique appelé rebec, après avoir subi diverses modifications dans sa forme, la matière dont il était composé, et le nombre de cordes dont il était monté.

Je crois ne pouvoir mieux faire, pour compléter les notions que j’ai données du caractère général de la musique de l’Orient, que de renvoyer aux exemples de quelques morceaux de cette musique, placés à la suite de ce résumé de l’histoire de l’art. On les trouveras sous les nos 3, 4, 5, 6.

La nécessité de faire comprendre les différences du système de tonalité de ces morceaux et de celui de la musique européenne, a fait employer dans leur notation des demi dièses et des demi bémols pour certaines notes. Ces signes ne donneront sans doute qu’une idée fort imparfaite de l’intonation des notes ; mais il en eût été de même, quels qu’eussent été les signes dont on se fût servi. Quoi qu’on fasse, il n’y a que l’exemple chanté qui puisse donner, à une intelligence musicale de l’Europe, une idée exacte d’une musique basée sur l’échelle musicale divisée par tiers de ton.