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RÉSUMÉ PHILOSOPHIQUE

de l’écriture hébraïque ; tandis qu’ils en ont une très sensible avec quelques uns de ceux de l’écriture démotique de l’ancienne Égypte. Par exemple, le maygaf, signe de jonction de deux sons, est exactement le même signe que l’oligon de la musique de l’église grecque et que l’un des caractère répondant à la lettre N de l’écriture égyptienne ; l’accent tebyr, ou brisé, a la forme d’un des caractères de L dans la même écriture ; Dargha (degré) est la même chose que l’aporrhoé de la notation grecque et que l’E égyptien ; le pazer (semeur) est le pelaston de la musique grecque et l’un des caractères de S retourné ; pachta (extenseur), qui est un accent de durée des sons, a la même forme que apté, signe de valeur des sons dans la notation de l’église grecque, et que l’un des caractères de M dans l’alphabet démotique des Égyptiens ; jetyb (retourné) est un des caractères de D du même alphabet ; zagef ghadol, émission puissante de la voix dans une grande étendue de sons, est un des caractères de T ; enfin, telicha ghedola, talcha et qarne farah sont évidemment des fragmens et des compositions de la fleur de lotos, comme les signes des tons et de leurs mutations dans la musique ecclésiastique grecque.

Que si nous jetons les yeux sur la notation musicale des Arméniens, nous remarquerons aussi que les signes de cette notation n’ont point d’analogie avec les caractères de l’écriture arménienne, tandis qu’il y en a une sensible avec ceux de l’alphabet démotique de l’antique Égypte, avec les signes de la notation ecclésiastique grecque et avec les accens musicaux des Juifs d’Orient. Un certain patriarche arménien, nommé Mesrop, passe pour avoir trouvé d’une manière miraculeuse, au quatrième siècle, et ces signes et les chants qu’ils expriment ; mais tout cela sort de la source commune. Si quelques différences se font remarquer dans la musique des peuples dont je viens de parler, elles tiennent au mode d’exécution plutôt qu’à l’esprit de l’art : cet esprit est uniforme, et malgré les altérations partielles de quelques signes des notations diverses, celles-ci, concourant au même objet, laissent toutes apercevoir le type commun. Il y aurait lieu d’être étonné que toutes ces analogies eussent échappé aux investigations des historiens de la musique, si les connaissances que nous avons acquises sur l’ancienne Égypte ne dataient d’hier.

Nous pouvons, par induction, connaître le caractère général de l’ancienne musique des Égyptiens et des Hébreux, ainsi que le système de la notation de cette musique ; les monumens nous éclairent sur les formes, les usages de leurs instrumens, et la composition de leurs concerts ; mais nous sommes dans une ignorance complète à l’égard de l’échelle musicale de ces peuples et de