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RÉSUMÉ PHILOSOPHIQUE

sept sons, auxquels on donne les noms de koung, chang, kio, pien-tché, tché, yu, pieu-koung ; ces noms de notes correspondent aux notes d’une gamme du ton de fa dont le si serait bécarre, comme on le voit dans ce tableau :

koung, chang, kio, pien-tché, tché, yu, pien-koung
fa, sol, la si, ut, ré, mi.

Les mots pien-tché et pien-koung indiquent, comme on vient de le voir les deux demi-tons de la gamme ; leur traduction exacte est : qui se résout sur tché, qui se résout sur koung. Il suit de là que ces deux notes sont nécessairement des notes appellatives d’autres notes supérieures, et qu’elles répondent à ce que nous appelons dans notre musique des notes sensibles.

Telle est la force d’appellation de ces notes dans la musique chinoise, que pien-tché et pien-koung ne sont jamais suivies d’autres notes inférieures. En cela, la gamme de la Chine diffère donc essentiellement de la gamme européenne, puisque celle-ci n’a qu’une note sensible, tandis qu’elle en a deux.

Mais ce n’est pas la seule différence qui existe entre cette gamme et la nôtre ; il en est une autre bien plus remarquable dans la distance du troisième son au quatrième, qui, au lieu d’être d’un demi ton, est d’un ton entier, en sorte qu’il n’y a qu’un demi-ton entre la quatrième et la cinquième note. La forme de cette gamme donne à la musique des Chinois un caractère étrange à notre oreille. Cette forme se retrouve dans l’ancienne gamme majeure des mélodies écossaises. Burney a fort bien remarqué cette similitude[1], et le docteur Lind, qui a résidé long-temps à la Chine, affirme que tous les airs qu’il y a entendus ressemblent aux vieilles mélodies écossaises. Il faut cependant remarquer que les Écossais ont aussi une gamme mineure, et que les Chinois ne paraissent point connaître ce mode musical ; il est du moins certain que le P. Amiot ne dit rien de l’existence d’un mode semblable dans la musique chinoise.

Souvent les deux demi-tons pien-tché et pien-koung sont entièrement supprimés ; dans ce cas, la gamme des mélodies n’est composée que de cinq notes fa, sol, la, ut, ré, ce qui leur donne un caractère étrange. Il y a des insrtumens qui n’ont que ces cinq notes.

Il est encore un point par où le système musical des Chinois diffère du système européen ; cette différence consiste dans la division de leur échelle

  1. A general history of music, t. 1, p. 31.