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DE L’HISTOIRE DE LA MUSIQUE

connaître ces modes, je vais les donner ici dans l’ordre de leurs caractères distinctifs de tonalité. La traduction des syllabes de la musique de l’Inde que je présenterai en notes de la musique moderne, n’est ni ne saurait être d’une exactitude rigoureuse, car il n’est aucun signe dans notre notation qui puisse exprimer des intervalles de trois quarts de ton ; ces signes existassent-ils, nous n’en pourrions tirer aucun avantage, de pareils intervalles étant absolument étrangers aux habitudes de notre sens musical. Ce n’est donc que comme une approximation que je donne la traduction des gammes indiennes.

Les sons qui ont le plus d’analogie avec les notes de la musique des Hindous appelées sa, ri, ga, ma, pa, dha, ni, sont ceux que nous appelons la, si, ut, ré, mi, fa, sol. Ces notes se disposent de la manière suivante dans le mode bhairava :

dha, ni, sa, ri, ga, ma, pa.
fa, sol, la, si, ut, re, mi.

Les syllabes écrites en caractères italiques sont des notes variables dans leur intonation : le chanteur les élève ou abaisse un peu selon le caractère du chant, pour donner une certaine grace à sa mélodie. C’est un effet original qui ne se rencontre que dans la constitution des modes indiens.

Le mode bhairava est, comme on vient de le voir, fondé sur une gamme de fa dont le si serait bécarre. Une pareille gamme est absolument contraire à toutes nos habitudes mélodiques et harmoniques ; car le demi ton que nous avons besoin d’entendre entre la troisième et la quatrième note de toute gamme majeure ne s’y trouve pas, et la note pa, c’est-à-dire la cinquième qui, dans toute gamme européenne, est une note d’aplomb sur laquelle se font les repos de mélodie et d’harmonie, est variable dans le mode bhairava, ou tantôt élevée, tantôt baissée. Remarquons encore que pour compléter la gamme il faudrait répéter dha à l’octave ; or, il n’y aurait point alors de note sensible à cette gamme ; car, suivant la distribution des vingt-deux srutis ou quarts de ton dans l’échelle musicale, il y a quatre quarts de ton entre pa et dha.

Le mode sriraga semble au premier abord avoir plus d’analogie avec notre échelle, car il se présente sous l’aspect d’une gamme du ton d’ut commençant par la cinquième note, ainsi qu’on peut le voir ici :