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PRÉFACE.

sur la musique des rois de France. Cependant une partie seulement de mon travail était terminée lorsque les engagemens que j’avais contractés comme maître de chapelle de S. M. le roi des Belges et comme directeur du Conservatoire de Bruxelles m’obligèrent à quitter Paris ; heureusement M. Danjou, jeune musicien d’un mérite distingué et d’une instruction peu commune, s’est avancé courageusement dans la route épineuse où je l’avais précédé ; il a entrepris l’exploration de tout ce qui concerne la musique dans les archives du royaume et dans celles du palais ; c’est un service important qu’il rend à l’histoire de l’art. Il veut bien me communiquer les résultats de ses travaux : je le prie de recevoir ici mes remercîmens sincères que je lui fais pour son obligeance.

Arrivé à Bruxelles et privé du secours des dépôts immenses que renferme la capitale de la France, j’ai dû songer à tirer du moins parti de ma nouvelle situation : les manuscrits de l’ancienne Bibliothèque des ducs de Bourgogne et les archives du royaume de la Belgique sont donc devenus le centre de mes recherches. Je n’ai qu’à me féliciter d’y avoir porté mes investigations, car déjà bien des faits inconnus jusqu’ici sont venus se joindre à ceux dont j’avais déjà fait une ample moisson. Par exemple, j’y ai retrouvé toute la composition de La Chapelle royale des princes gouverneurs des Pays-Bas, depuis son origine jusqu’à la révolution brabançonne, c’est-à-dire dans un espace de près de deux siècles.

Malheureusement, ce que j’ai pu faire pour la France et la Belgique, je ne puis l’étendre aux autres pays, parce que ce n’est que sur les lieux que de pareilles recherches peuvent être faites. Que de choses ignorées jusqu’ici sur les artistes musiciens qui, dans les quinzième et seizièmes siècles, furent attachés comme compositeurs, comme chanteurs ou comme instrumentistes à la cour des empereurs, des princes souverains de l’Allemagne et de l’Italie, aux chapelles des églises cathédrales et collégiales, des chapitres et des abbayes de ces deux contrées, des rois d’Angleterre, d’Espagne et de Portugal ! Les musiciens espagnols, par exemple, qui ont été certainement des hommes de grand mérite dans les derniers siècles, ne sont pas connus, même de leurs compatriotes. Leurs ouvrages, qu’on trouve en grande abondance dans toutes les églises et dans les couvens, attestent des talens de premier ordre et un génie original ; mais on manque presque