(Rêveur, pendant que la même musique douce et lointaine reprendra)
Que ton plus cher espoir, femme, se réalise !
À tes vœux je m’unis puisque tu t’es promise.
Qu’il te revienne fier, superbe, radieux,
Qu’il t’apporte, ce soir, son amour anxieux !
Car la victoire, enfin, a couvert de son aile
Le peuple de la France héroïque et fidèle.
Espère, ô femme, et vis… car tous ne meurent pas !
Malgré l’immense deuil, malgré tous les trépas,
Tu peux sans égoïsme avoir cette espérance
De revoir et d’aimer ton poilu de la France.
Mais pour d’autres qui vont, livides de douleurs,
Sur les tombes verser d’intarissables pleurs ;
Pour la mère éplorée et pleurante qui prie,
Pour l’épouse éperdue en son âme meurtrie,
Pour celle qui sanglote et gémit nuit et jour,
— Fiancée au héros qui fut tout son amour,
À l’atroce douleur désormais fiancée, —
Pour celle-là qui voue au tombeau sa pensée ;
Ô toi qui chante, femme, et jettes dans le soir,
Aux échos attentifs, tes accents pleins d’espoir,
Pour la femme qui pleure offre une humble prière !
Elle seule a donné son âme tout entière :
— À Dieu qui la bénit du haut de son soleil,
— À l’aimé sommeillant de l’éternel sommeil,
— À la Patrie émue en sa gloire éclatante. —
Elle n’a rien gardé… ni l’espoir, ni l’attente !
(La même voix fredonnera de nouveau le refrain d’avant. Le Canadien soulèvera la draperie, et la porte s’ouvrira lentement. Dans l’encadrement apparaîtra une jeune fille tenant une lampe à la main.)
(Émerveillé et reculant d’un pas, sans toutefois abandonner la draperie)
Ô Ciel !
(Surprise et comme effrayée)
Un homme ici !