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Foxham !

Les cachots secrets !

C’étaient les trois seules pensées qui demeuraient en lui.

Mais où était cette rue Champlain en la basse-ville ?

Où se trouvait située la caserne ?

Durant un quart d’heure il erra dans les ruelles de la ville basse. Par hasard il croisa un batelier qui revenait de quelque voyage nocturne.

Le batelier lui indiqua la rue Champlain.

Louis Du Calvet reprit sa course… maintenant il savait où aller.

Tout en courant, il s’assura que sous son manteau il avait toujours une courte épée et des pistolets. Car il venait de se jurer que cette fois il ne ménagerait pas la vie de Foxham : il lui ferait rendre son père d’abord, puis il le tuerait pour venger la mort de sa mère !

Il arriva en vue des casernes. Tout était désert et silencieux.

Le jeune homme s’approcha à pas furtifs. Par une fenêtre il voyait filtrer un pâle rayon de lumière. Il fut bientôt devant cette fenêtre, pratiquée à moins de deux mètres du sol. Les volets n’étaient pas fermés. À l’intérieur d’épais rideaux empêchaient le regard de pénétrer. Mais ces rideaux se trouvaient légèrement entr’ouverts, et le jeune homme allait jeter un regard à l’intérieur du bâtiment, quand son attention fut attirée par un murmure de voix qui arrivait, non du bâtiment, mais du dehors et non loin de lui, à sa gauche. Il jeta les yeux dans cette direction et il perçut un autre rayon de lumière, et en même temps, dans la nuit moins noire à cause de la neige qui tombait, il aperçut une sorte de hutte de forme ronde qui se trouvait à quelques pas de l’entrée principale de la caserne.

Il marcha à pas de loup vers cette hutte et vers le rayon de lumière. Cette lumière passait à travers la vitre qui servait de fenêtre. Le jeune homme glissa un regard à l’intérieur et vit deux soldats en train de jouer aux dés à la clarté d’une lanterne. Il comprit que c’étaient deux sentinelles qui cherchaient à tuer le temps. Les deux hommes parlaient de temps en temps à voix basse. Louis Du Calvet ne crut pas devoir les déranger, ces hommes ne lui étaient pas nuisibles et il reprit le chemin de la fenêtre éclairée, à l’extrémité de la caserne.

Il regarda vivement entre les deux rideaux. Il ne vit qu’une table, mais derrière cette table un officier anglais en train de retirer son épée qu’il déposa sur la table. Et cet officier, c’était Foxham.

Le jeune homme n’en voulut pas voir davantage : roulant un pan de son manteau autour de son bras, il enfonça deux carreaux de la fenêtre et d’un bond sauta dans le living-room de Foxham.

Devant cette étrange apparition le lieutenant pâlit d’effroi.

Louis Du Calvet marchait sur lui l’épée à la main, menaçant, terrible.

— Rendez-moi mon père ! cria le jeune homme. Ensuite, je vengerai ma mère !

Foxham, d’un geste rapide saisit son épée sur la table et attendit, tremblant.

— Allons ! bandit, parle ! vociféra le jeune homme hors de lui.

— Ah ! ah !… ricana Foxham, tu me crois donc le gardien de ton père ?

— Je te sais son bourreau !

— Prends garde ! dit Foxham.

— À quoi ?… à ton épée ?… Aux pistolets de tes assassins qui ont tué ma mère ?… Aux cachots de ton maître Haldimand ?… Allons ! je n’ai pas peur ! Je veux que tu rendes la liberté à mon père !

— Va demander cela au général Haldimand !

— Je n’ai pas d’affaires à ce tyran. C’est l’esclave à qui j’ai affaire en ce moment, c’est à toi qui es le bras qui exécute, et c’est toi qui agiras ou qui mourras !

Ce disant Louis Du Calvet porta un rude coup droit à Foxham qui, par un singulier miracle, esquiva le coup.

Puis les épées s’engagèrent rapidement, Louis Du Calvet attaquait par un jeu rapide comme l’éclair, Foxham parait ou mieux il arrivait à esquiver les coups par la retraite. Il reculait vers la chambre à coucher, peut-être dans l’espoir de s’y barricader en attendant que le bruit de cette lutte attirât l’attention des soldats endormis dans leur dortoir.

Mais il ne put arriver à cette chambre sans que l’épée agile du jeune français ne l’eût blessé au bras gauche, à la poitrine et à l’épaule. Foxham se sentait perdu…

Mais, tout à coup, les deux sentinelles que Louis Du Calvet avait vues jouer aux dés dans leur guérite entrèrent le fusil à la main. Elles avaient été attirées par le bruit des vitres que le jeune français avait cassées et ensuite par le cliquetis des épées.

En voyant les deux sentinelles Foxham soupira joyeusement.

— Rends-toi ! cria-t-il à Louis Du Calvet.

Pour toute réponse le jeune homme fondit de nouveau sur son ennemi, et il allait peut-