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pace, assez semblable au sifflement d’une balle de rifle, une lueur sanglante déchira l’obscurité du cabinet de travail, toute pareille à la lueur violente de l’éclair par les soirs d’orage, puis il y eut comme le roulement d’un tonnerre lointain…

Et alors, sous l’œil hagard des agents de police, la porte placée derrière le bureau du docteur, cette porte par où avait paru le mystérieux personnage, s’ouvrit lentement… largement. Les tentures s’écartèrent comme d’elles-mêmes, et la porte prit peu à peu la dimension d’une haute et large arcade. Par cette arcade l’œil étonné des policiers pénétra dans une salle immense, violemment éclairée de lumières invisibles, dépourvue de tout mobilier, sans tapis, mais avec un parquet d’une riche mosaïque. La voûte élevée de cette salle était supportée par quatre énormes colonnes d’un marbre bien foncé. Aucune fenêtre, aucune croisée ! Mais, chose bien plus étonnante à l’œil curieux des policiers, en plein centre des quatre colonnes se dressait une chaise de coiffeur. Près de la chaise, debout, un colosse se tenait. Il avait les cheveux bleus, les moustaches bleues, la barbe bleue. Sa chemise bleue était ouverte au col et retroussée des manches. Au ventre il portait un court tablier d’un tissus écarlate. Et la besogne à laquelle il s’occupait était assez singulière : le colosse repassait un énorme rasoir sur