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tenir compte de l’altération des traits, oui, tout cela parut fort singulier à M. Quik. Il se sourit, et, de ce fait, sa perspicacité fut très en éveil. Mentalement il se décrivit une scène terrible de jalousie entre l’époux et l’épouse… Il crut se voir bientôt en face d’un sanglant barbe-bleue !

Il pensa :

— Du diable ! si ce soir je ne tiens pas tous les fils du mystère qui m’enveloppe ! Oh ! monsieur Jacobson, nous allons rire, je vous le jure !

Mme Jacobson s’arrêta devant la porte de la salle à manger, s’effaça et du geste indiqua à M. Quik un siège à la table.

M. Quik, en parfait gentilhomme, s’inclina respectueusement et alla prendre le siège indiqué.

Discrètement Mme Jacobson referma la porte de la salle à manger, sans un bruit, sans même que M. Quik s’en aperçut. Et, par conséquent, il ne put s’apercevoir que le docteur Hiram Jacobson se trouva précisément derrière cette porte, qu’il sourit étrangement à sa chère Lina, qu’il la prit à la taille et l’embrassa longuement et tendrement.

Mais par contre, M. Quik s’aperçut ou mieux il vit une autre porte s’ouvrir en face de lui, vers la cuisine, et il vit encore une ravissante soubrette, toute souriante, se mettre à sa disposition pour le servir…

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

À neuf heures, M. Quik quitta la salle à manger, très satisfait de l’excellente cuisine de la maison.

Il traversa le vestibule dans sa longueur et arriva ainsi à la porte du cabinet de travail du docteur Jacobson. La porte était ouverte, elle invitait à entrer : M. Quik entra. Il trouva le docteur au travail.

À l’apparition de son hôte le docteur se leva vivement et s’avança, mains tendues, en disant :

— Ah ! mon cher neveu, charmé de te revoir. Tu as sans nul doute passé une bonne nuit ?

— Très bonne, mon oncle.

— Pourtant, tu m’as l’air bien peu reposé… la pâleur de ton visage,