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la rue un genou en terre, il paraissait épier attentivement le passage de quelqu’un ou de quelque chose. Quoi ?… Pascal se le demandait anxieusement.

La tête et la figure de l’homme disparaissaient presque totalement sous les larges ailes d’un chapeau de feutre gris.

— Cré gué ! murmura Pascal, est-ce vraiment un chasseur ou un assassin ? c’est égal, ça m’a l’air drôle tout de même ! Je veux qu’on m’étripe si je ne finis pas par savoir à qui ou à quoi ce particulier-là en veut !

À cet instant, au travers des arbres, il remarqua la silhouette d’un homme — vêtu de kaki — descendant la rue dans la direction du camp militaire. Au même instant aussi il vit le chasseur inconnu porter son fusil à l’épaule. Pascal frémit.

Un meurtre !

Cet idée terrible le fit bondir. Il s’élança, exécuta un bond prodigieux et la minute d’après il tombait sur l’homme embusqué auquel if se grippa de toutes ses forces. En même temps il lançait un appel formidable :

— À l’aide !

Très surpris par cette brusque agression, l’homme au fusil, avait cherché à se dégager de l’étreinte de Pascal. Il s’en suivit une courte lutte. Pascal, avec l’énergie d’un homme au désespoir, tint bon.

Et quand, à l’appel de l’ancien sacristain, le passant inconnu s’approcha, Pascal poussa une exclamation de stupeur. Puis, avec joie, il s’écria :

— Ah ! bon Dieu ! c’est vous, monsieur Jules ?

— Eh bien ! demanda Jules Marion, plus stupéfait que Pascal et reconnaissant le fidèle serviteur de l’abbé Marcotte, que signifie cette prise de corps ?

— Arrachez-lui son fusil d’abord ! cria Pascal suffoquant par les efforts surhumains qu’il faisait pour maîtriser son adversaire, qui paraissait doué d’une force musculaire peu commune.

Jules fit comme le commandait Pascal.

L’homme fut désarmé.

Pascal, alors, lâcha prise et se releva suant, soufflant, grognant :

— Le bandit !… il allait tirer sur vous, monsieur Jules.

À ce moment l’homme se relevait, et Jules Marion ne pouvait retenir un geste de profonde stupéfaction en reconnaissant tout à coup celui qu’il avait surpris, un soir, avec Violette.

— Vous ! balbutia-t-il.

— Le docteur Randall !… murmura Pascal à son tour, très abasourdi.

— Le docteur Randall ! répéta Jules, la tête perdue, mais se rappelant les dernières paroles de Violette :