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Ce fut Harold Spalding qui fut nommé à la présidence de cette Commission spéciale, et ce fut avec un sourire cruel aux lèvres qu’il se dit :

— Maintenant, nous verrons bien !


Ce soir-là, Harold Spalding écrit une simple lettre. Mais cette lettre doit lui procurer une jouissance infinie, car dans ses yeux, qu’il lève de temps à autre comme pour chercher une expression, un mot qui lui manque, oui, dans ses yeux bleus brillent des éclairs de joie barbare, des rayonnements de triomphe étincellent.

Quand il a écrit la dernière phrase, quand d’une main nerveuse il a posé sa signature, il rejette sa plume fontaine, pousse un long soupir de satisfaction, se renverse dans son fauteuil et murmure ces paroles :

— Enfin, cela va lui apprendre à cet instituteur, à ce Marion, à ne pas tant se moquer de nous…

Il s’interrompt tout net : ses regards qu’il vient de lever se fixent avec surprise sur une jeune fille, dont la silhouette légère et gracieuse se profile un peu vaguement dans l’ombre du cabinet. La figure d’enfant de cette jeune fille semble exprimer une mélancolie profonde.

— Pardonne-moi, père, de te déranger. Je viens, dit la jeune fille pour s’excuser, prendre les journaux du soir.

— Les journaux ? Certainement. Tiens, Violette, ils sont là, tous, je crois, le Daily News, le Telegram, le Herald…

En même temps que ces paroles Harold Spalding réunit quelques journaux éparpillés sur sa table de travail et les remet à sa fille.

— À propos, ajoute-t-il, un ami m’a remis aujourd’hui une découpure de journal français que voici. Tu y liras un éloge superbe du rôle que joue la Grande-Bretagne dans la guerre européenne. Ah ! c’est magnifique ! On ne peut dire les choses avec plus de justesse ! On ne peut mieux rendre justice à notre grand Empire ! Avant toute chose je t’engage à lire cet article, un article qui a d’autant plus de poids qu’il vient d’une plume française. Ah ! une plume superbe, elle aussi ! N’est-ce pas que tu me promets de lire cet article ? Et puis, tu m’en diras des nouvelles… hein, ma petite Violette ?

— Je te le promets, père… je le lirai tout à l’heure après que j’aurai causé cinq minutes avec toi.

La jeune fille a prononcé ces paroles avec une telle tristesse dans le ton de sa voix que Harold demeure tout surpris.

D’habitude Violette Spalding est souriante ; et, gaie par tempérament, elle aime le rire sonore et joyeux.