Page:Féron - La revanche d'une race, paru dans L'Étoile du Nord, 1927-1928.djvu/182

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pliante, dites-moi, voulez-vous ?… dites-moi que vous ne m’avez pas oublié… que vous m’avez gardé un petit coin dans votre généreux cœur… Ah ! Violette, vous ne savez pas quel bien cela me ferait !…

— Ne vous souvenez-vous pas de mes paroles ? dit la jeune fille d’une voix grave… que je ne pourrais « jamais oublier ! ».

— Oui, je me rappelle, Violette… Mais cela ne me suffit pas… il faut que vous me disiez autre chose… une chose que vous m’avez déjà dite !…

— Quelle chose donc ? demanda Violette avec un sourire qui prouvait qu’elle comprenait.

— Vous savez bien et, dois-je vous l’avouer ?… il n’y a que cela qui me fera croire que vous m’avez vraiment pardonné. N’est-ce pas, Violette ?… dites… et il lui souriait ardemment, et ses yeux, un peu ternes la suppliaient.

Et elle alors, avec ce charme magnétique qui la rendait belle, — elle, cette charmeuse, alla jusqu’à se pencher à l’oreille du cher blessé et murmura avec un doux reproche :

— Méchant !… vous voulez absolument savoir de mes lèvres ce que vous devinez dans mon cœur !… Eh bien… oui… puisque je vous ai suivi… puisque je…

Elle s’arrêta souriante et un peu rougissante…

Et lui, haletant et serrant plus fort la main qu’elle lui abandonnait volontiers, lui bégaya :

— puisque je… ah ! finissez… finissez…

— Oui, je vous le répète… puisque je vous…

Jules comprit… il eut un vertige… il s’écria avec un accent de joie délirante :

— Vrai, Violette ? …dois-je croire ?… — …que vous m’ai…

— Oui, méchant, croire… croire bien fort ! vous m’ai…

— Chut !… souffla Violette en posant sa main libre sur la bouche de Jules ; et toujours à son oreille elle ajouta, pendant que lui frissonnait sous ce souffle ardent, chaud et pur :

— Oui… beaucoup… beaucoup… toujours !… Puis se redressant tout à coup :

— Ah ça ! comme vous êtes tout pâle !… Je vous fatigue… et puis, vous avez votre lettre à lire… je me sauve… à tout à l’heure !…

Et elle s’esquiva après avoir retiré sa main moite de la main fiévreuse et frissonnante de Jules.

Lui, brûlant d’une joie intense, d’un bonheur nouveau, la suivit d’un regard d’extase.

Et sous l’empire de cette joie, de ce bonheur, il ferma les yeux et demeura quelques minutes absorbé dans une contemplation de ciel, dans des pensées de rêves sublimes.

Il se rappela soudain la lettre apporté de Paris.