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vous voulez m’en croire, mettons cette affaire de côté et n’en parlons plus !

— Soit, répondit froidement le docteur. Seulement, si vous apprenez un jour que Marion vous a enlevé votre fille, vous ne vous en prendrez qu’à vous même.

— Que dites-vous ? s’écria Harold en pâlissant. Marion m’enlever Violette ? C’est impossible ! Qui vous fait supposer ?

— Le nouveau que j’ai à vous apprendre, — c’est ce nouvel incident qui me fait penser qu’un de ces jours Violette vous manquera. Elle se sera tout simplement embarquée jour l’Angleterre pour aller rejoindre votre pire ennemi.

— Que me contez-vous là ? fit Harold avec une stupeur toujours croissante.

— Je vous conte que Jules Marion vous hait, qu’il se moque de vous, et que, après l’insulte publique qu’il vous a faite, il veut se donner la gloire de vous prendre votre fille pour ensuite vous la jeter aux bras déshonorée !

— Ah !… si cela était ! gronda Harold dont la physionomie se fit soudain terrible.

Eh bien ! poursuivit froidement le docteur, cela sera ainsi, à moins que vous n’agissiez.

— Mais enfin, s’écria le millionnaire en s’emportant tout à fait, dites-moi ce que vous avez découvert, et ce qui vous fait émettre de telles suppositions.

— En ce cas, écoutez-moi et vous trouverez que mes suppositions sont très vraisemblables et très susceptibles de se réaliser.

— Allez je vous écoute ! répondit rudement Harold, ses regards coupés de farouches éclairs.

Le docteur raconta alors comment Violette s’étant rappelée la conversation surprise entre lui-même et le millionnaire, était venue le trouver pour avouer son amour pour Jules Marion, — pour dire que s’ils ne cessaient, le docteur et Harold, de s’attaquer à Jules Marion, elle ferait un scandale et que, pour s’exonérer, elle ne craindrait pas de dénoncer les machinations odieuses de son père et du docteur.

Il ajouta que Jules, qui avait été prévenu — ou mieux, qui avait accompagné Violette et s’était tenu dans l’ombre à l’écart — était survenu et qu’il avait osé frapper le docteur en disant avec une insolence inouïe. « Tenez ! allez dire à Spalding comment je traite les scélérats » !

Et qu’enfin Jules et Violette, bras-dessus bras dessous, s’étaient éclipsés dans la nuit.

On voit que le docteur se plaisait à inventer toutes espèces de fables pernicieuses pour mieux arriver à son but. Du reste, le mensonge et la calomnie lui étaient familiers. C’était un de ces êtres qui ne trouvent de bon et d’honnête que leur personnage, de vrai et de respectable que leur dire et leur fait.