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un beau lustre était suspendu au centre de la pièce. Si je pouvais trouver le bouton électrique ?

J’avais des allumettes. Je frottai

l’une d’elles. Mais à la même seconde je fus saisi par quatre bras vigoureux. De force on m enfonça une poire d’angoisse dans la bouche, puis je fus ligoté, pieds et poings, soulevé, emporté. Puis je tombai.. .Il me semble bien que je tombai un siècle durant : la chute me parut interminable. Enfin, je touchai terre, ou plutôt je tombai sur quelque chose dont je ne pus déterminer la nature ; cela me parut des l’abord un amas de matières quelconques qui, sous le poids de mon corps, craquèrent curieusement et crissèrent comme des os qui se brisent. Ou’é-^ tait-ce  ?

’Je n’eus pas le temps de résoudre ce problème. 

’Une vive clarté jaillit tout à coup comme au travers d’une muraille. Je vis une cave, un sous-sol quelconque, mais je vis autre chose : le cerceuil que j’avais vu làhaut !

Une autre chose acheva mon épouvante 

et mon horreur : je découvris que j’étais étendu sur un tas de squelettes. Et alors, comme si la muraille s’était ouverte devant moi. je vis apparaître une silhouette humaine, une silhouette qui flamboyait c’était la FEMME D’OR ! Oui, elle était là, devant moi, radieuse et souriante. Mais son sourire, cette fois encore, me fit frissonner. Elle parla d’une voix à l’accent métallique... c’était comme une voix d’or. Elle me dit : ’ — Jacques Audet, je t’aurais donné tout mon amour si tu avais su t’y prendre. Mais à cette heure, pour avoir tenté de pénétrer dès secrets qui ne t’appartiennent pas, c’est ma haine que tu as recueillie ! « Elle lit un geste tragique. « J’essayai de me soulever.. .je voulus parler. .. Un éclat de rire infernal retentit au-dessus de ma tète, et à la minute même l’obscurité se fit autour de moi. LÀ FEMME 1) OR avait disparu Alors, dans l’énorme silence qui suivit, je me posai ces questions brillantes : où suis-je ? Que vais-je devenir ? Quelle était cette femme ? Comment me connaissait-elle ...Je sentais mes cheveux tomber un à un sous l’horreur qui ne cessait de m’assiéger. Mais je n’étais pas au bout de mon supplice. Non...vous allez voir. « Un brusque éclair troua ma noirceur, un coup de tonnerre plus violent que les autres peut-être retentit. Et alors il me sembla que les fondations de la maison venaient de s’ouvrir, de s’écarter, de s’effondrer. En effet, une explosion épouvantable se produisit aussitôt, presque simultanément, je me sentis soulevé. Une clarté formidable m’environna, et dans cette clarté je vis passer LÀ FEMME D’OR...elle paraissait fuir dans une course affolée, désespérée. J’entendis des cris, des hurlements, des appels éperdus. Et j’étais toujours emporté sur mon nuage de lumière, et cette lumière me semblait des flammes ardentes qui me dévoraient. « L’épouvante fut trop forte, je perdis connaissance. Le lendemain, mes amis, je me retrouvai sur une couche de l’Hôpital-Général. — Ouf ! cria le reporter en essuyant son front moite. — N’est-ce pas que c’est terrible ? demanda l’avocat en vidant son verre de vin. — C’est incroyable ! déclara l’architecte dont tous les traits étaient livides. — Mais LÀ FEMME D’OR ? interrogea AIban Ruel, n’as-tu jamais appris ce qu’elle était devenue ? L’avocat n’eut pas le temps de répondre à cette question ; car lui et ses deux compagnons venaient de se dresser avec effroi et stupeur ;car, par la porte ouverte de la pièce qu ils occupaient et qui donnait sur un couloir qui conduisait d’un côté à un escalier communiquant avec les étages supérieurs» et, de l’autre, à une porte ouvrant sur la rue Saint-Dominique, oui, dans ce couloir une ombre humaine avait passé...une silhouette d’or, une ombre furtive et dorée, et les trois amis avaient murmuré, comme un écho perdu dans les espaces : — LÀ FEMME l)’OR ! Le premier, après le saisissement éprouvé, Alban Ruel s’était élancé vers le couloir. Ce couloir était désert. Audet et Lavoie l’avaient suivi. Dans l’escalier qu’on apercevait, personne. Le reporter passa une main tremblante sur son front ruisselant et demanda : — Est-ce que nous rêvons ? — Non, répondit l’avocat d’une voix frissonnante, parce que LÀ FEMME D’OR existe encore, parce que nous l’avons vue ce soir AU NOUVEAUTÉS, parce que nous venons de la revoir ici même ! — Mais alors, s’écria l’architecte, elle est dans cet hôtel ? — Il n’y a rien d’impossible qu’elle y fût, dit l’avocat ; mais je suis sûr qu’elle ne s’y trouve plus ! — (Pourquoi ? interrogea Alban Ruel. — Parce que je sais cette femme insaisissable. — Mais si nous fouillions l’hôtel ? — Non elle n’est pas femme à se jeter bêtement dans un piège ! — Mais cette femme est donc un phénomène ?

s’écria le reporter.

— Ah ! se mit à rire l’avocat, je pense que tu commences à croire à l’existence de LÀ FEMME D’OR. — Jy crois, et veux-tu savoir une chose ? — Voyons ! — Je vais à mon tour me mettre à la poursuite de cette femme. — .Pourquoi ? demanda tranquillement l’avocat. — Pour te l’amener, ou pendue à mon cou et pantelante d’amour, ou pieds et poings liés comme un assassin. — Et pour prouver quoi ? — Que le reporter a du policier et du bon, et pour te prouver qu’il n’est en ce monde de mystère dont on ne puisse avoir la clef ! Car, cette clef, c’est ma réputation et la clef de mon avenir ! — Prends garde au panneau ! sourit Jacques Audet. . — Je vais m’y prendre de telle façon que je me moquerai joliment du panneau. Je veux cette femme, je l’aurai. Elle est jeu¬