Le Destin me redoit du bonheur, des baisers,
Et ces tendres regards qui couvent.
Car je n’ai bu qu’un lait mercenaire et rusé ;
Car je n’ai tété qu’une louve.
Ma nourrice dans l’herbe et les joncs du marais
Imprimait ma couche rugueuse ;
Et dans mes songes orphelins elle apparaît
Avec sa chair de belle gueuse.
Mais de ma mère, morte au loin, il n’est resté
Qu’une pâle photographie.
Je m’insurge. Je veux à la mort disputer
Son doux bruit, son odeur, sa vie ;
À son tombeau perdu reprendre ses cheveux
Renflés en coques sur ses tempes,
Sa bouche au secret pâle, et, myopes et bleus,
Ses yeux voilés comme des lampes.