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Marie. — Je les aurais chassés pour me raccommoder avec le roi mon fils. Mais il fallait faire des bassesses, revenir sans autorité, et subir votre joug tyrannique : j’aimais mieux mourir.

Richelieu. — Ce qui était le plus bas et le moins digne de vous, c’était de vous unir à la maison d’Autriche, dans des négociations publiques, contre l’intérêt de la France. Il aurait mieux valu vous soumettre au roi votre fils ; mais Fabroni vous en détournait toujours par des prédictions.

Marie. — Il est vrai qu’il m’assurait toujours que la vie du roi ne serait pas longue.

Richelieu. — C’était une prédiction bien facile à faire, la santé du roi étant très mauvaise, et il la gouvernait très mal. Mais votre astrologue aurait dû vous prédire que vous vivriez encore moins que le roi. Les astrologues ne disent jamais tout, et leurs prédictions ne font jamais prendre des mesures justes.

Marie. — Vous vous moquez de Fabroni, comme un homme qui n’aurait jamais été crédule sur l’astrologie judiciaire. N’aviez-vous pas de votre côté le P. Campanelle, qui vous flattait par ses horoscopes ?

Richelieu. — Au moins le P. Campanelle disait la vérité ; car il me promettait que Monsieur ne régnerait jamais, et que le roi aurait un fils qui lui succéderait. Le fait est arrivé, et Fabroni vous a trompée.

Marie. — Vous justifiez par ce discours l’astrologie judiciaire et ceux qui y ajoutent foi ; car vous reconnaissez la vérité des prédictions du P. Campanelle. Si un homme instruit comme vous, et qui se piquait d’être un si fort génie, a été si