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inventassent de nouveaux plaisirs, qui fussent capables des crimes les plus noirs, et devant lesquels rien ne vous fît souvenir ni de la religion, ni de la pudeur violée. Avec de telles mœurs, on n’a garde de trouver des gens de bien. Pour moi, j’en ai trouvé ; j’ai su m’en servir dans mon conseil, dans les négociations étrangères, dans plusieurs charges : par exemple, Sully, Jeannin, d’Ossat, etc.

Henri III. — À vous entendre parler, on vous prendrait pour un Caton ; votre jeunesse a été aussi déréglée que la mienne,

Henri IV. — Il est vrai, j’ai été inexcusable dans ma passion honteuse pour les femmes ; mais, dans mes désordres, je n’ai jamais été ni trompeur, ni méchant, ni impie ; je n’ai été que faible. Le malheur m’a beaucoup servi ; car j’étais naturellement paresseux et trop adonné aux plaisirs. Si je fusse né roi, je me serais peut-être déshonoré ; mais la mauvaise fortune à vaincre et mon royaume à conquérir m’ont mis dans la nécessité de m’élever au-dessus de moi-même.

Henri III. — Combien avez-vous perdu de belles occasions de vaincre vos ennemis, pendant que vous vous amusiez sur les bords de la Garonne à soupirer pour la comtesse de Guiche ! Vous étiez comme Hercule filant auprès d’Omphale.

Henri IV. — Je ne puis le désavouer ; mais Coutras, Ivry, Arques, Fontaine-Française, réparent un peu…

Henri III. — N’ai-je pas gagné les batailles de Jarnac et de Moncontour ?

Henri IV. — Oui ; mais le roi Henri III soutint mal les espérances qu’on avait conçues du duc