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ne l’êtes pas, et que je suis fils d’un chanoine de Bordeaux.

Le prince. — C’est de quoi personne ne peut répondre ; mais je ne saurais le croire. Ce n’est pas la conduite de ta mère qui leur donne cette pensée ; mais n’est-ce point la tienne qui leur fait tenir ce discours ?

Richard. — Ils disent que je prie Dieu comme un chanoine, que je ne sais ni conserver l’autorité sur les peuples, ni exercer la justice, ni faire la guerre.

Le prince. — Ô mon enfant ! tout cela est-il vrai ? Il aurait mieux valu pour toi passer ta vie moine à Westminster, que d’être sur le trône avec tant de mépris.

Richard. — J’ai eu de bonnes intentions, j’ai donné de bons exemples ; j’ai eu même quelquefois assez de vigueur. Par exemple, je fis enlever et exécuter le duc de Glocester mon oncle, qui ralliait tous les mécontents contre moi, et qui m’aurait détrôné si je ne l’eusse prévenu.

Le prince. — Ce coup était hardi et peut-être nécessaire ; car je connaissais bien mon frère, qui était dissimulé, artificieux, entreprenant, ennemi de l’autorité légitime, propre à rallier une cabale dangereuse. Mais, mon fils, ne lui avais-tu donné aucune prise sur toi ? D’ailleurs, ce coup était-il assez mesuré ? l’as-tu bien soutenu ?

Richard. — Le duc de Glocester m’accusait d’être trop uni avec les Français, anciens ennemis de notre nation : mon mariage avec la fille de Charles VI, roi de France, servit au duc à éloigner de moi les cœurs des Anglais.

Le prince. — Quoi ! mon fils, tu t’es rendu sus-