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aux côtés de ce tombeau. Cette eau est pure et claire : le ciel serein, qui est peint dans cette eau, sert à la rendre encore plus belle. Elle est bordée de saules naissants et d’autres arbrisseaux tendres dont la fraîcheur réjouit la vue.

Parrhasius. — Jusque-là il ne me reste rien à souhaiter. Mais vous avez encore un grand et difficile objet à me représenter ; c’est là que je vous attends.

Poussin. — Quoi ?

Parrhasius. — C’est la ville. C’est là qu’il faut montrer que vous savez l’histoire, le costume, l’architecture.

Poussin. — J’ai peint cette grande ville d’Athènes sur la pente d’un long coteau pour la mieux faire voir. Les bâtiments y sont par degrés dans un amphithéâtre naturel. Cette ville ne paraît point grande du premier coup d’œil : on n’en voit près de soi qu’un morceau assez médiocre, mais le derrière qui s’enfuit découvre une grande étendue d’édifices.

Parrhasius. — Y avez-vous évité la confusion ?

Poussin. — J’ai évité la confusion et la symétrie. J’ai fait beaucoup de bâtiments irréguliers ; mais ils ne laissent pas de faire un assemblage gracieux, où chaque chose a sa place la plus naturelle. Tout se démêle et se distingue sans peine ; tout s’unit et fait corps : ainsi il y a une confusion apparente, et un ordre véritable quand on l’observe de près.

Parrhasius. — N’avez-vous pas mis sur le devant quelque principal édifice ?

Poussin. — J’y ai mis deux temples. Chacun a une grande enceinte comme il la doit avoir, où l’on distingue le corps du temple des autres bâti-