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saient pas pour de tels exploits. Voici ce que je répondis aux sollicitations que vous me fîtes là-dessus : « Vous devez être plus content, disais-je, des louanges du sénat que vous avez méritées par votre bonne conduite, que d’un triomphe ; car le triomphe marquerait moins la vertu du triomphateur, que le bonheur dont les dieux auraient accompagné ses entreprises. » C’est ainsi qu’on tâche d’amuser comme on peut les hommes vains et incapables de se faire justice.

Cicéron. — Je reconnais que j’ai toujours été passionné pour les louanges ; mais faut-il s’en étonner ? N’en ai-je pas mérité de grandes par mon consulat, par mon amour pour la république, par mon éloquence, enfin par mon amour pour la philosophie ? Quand je ne voyais plus de moyen de servir Rome dans ses malheurs, je me consolais, dans une honnête oisiveté, à raisonner et à écrire sur la vertu.

Caton. — Il valait mieux la pratiquer dans les périls, qu’en écrire. Avouez-le franchement, vous n’étiez qu’un faible copiste des Grecs : vous mêliez Platon avec Épicure, l’ancienne Académie avec la nouvelle ; et après avoir fait l’historien sur leurs dogmes, dans des dialogues où un homme parlait presque toujours seul, vous ne pouviez presque jamais rien conclure. Vous étiez toujours étranger, dans la philosophie, et vous ne songiez qu’à orner votre esprit de ce qu’elle a de beau. Enfin vous avez toujours été flottant en politique et en philosophie.

Cicéron. — Adieu, Caton ; votre mauvaise humeur va trop loin. À vous voir si chagrin, on croirait que vous regrettez la vie. Pour moi, je