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XXVII

ALEXANDRE ET DIOGÈNE


Combien la flatterie est pernicieuse aux princes


Diogène. — Ne vois-je pas Alexandre parmi les morts ?

Alexandre. — Tu ne te trompes pas, Diogène.

Diogène. — Eh, comment ! les dieux meurent-ils ?

Alexandre. — Non pas les dieux, mais les hommes mortels par leur nature.

Diogène. — Mais crois-tu n’être qu’un simple homme ?

Alexandre. — Hé ! pourrais-je avoir un autre sentiment de moi-même ?

Diogène. — Tu es bien modeste après ta mort. Rien n’aurait manqué à ta gloire, Alexandre, si tu l’avais été autant pendant ta vie.

Alexandre. — En quoi donc me suis-je si fort oublié ?

Diogène. — Tu le demandes, toi qui, non content d’être le fils d’un grand roi qui s’était rendu maître de la Grèce entière, prétendais venir de Jupiter ? On te faisait la cour, en te disant qu’un serpent s’était approché d’Olympias. Tu aimais mieux avoir ce monstre pour père, parce que cela flattait davantage ta vanité, que d’être descendu de plusieurs rois de Macédoine, parce que tu ne trouvais rien dans cette naissance au-dessus de l’humanité. Ne souffrais-tu pas les basses et honteuses flatteries de la prêtresse de Jupiter-