Page:Fénelon - De l’éducation des filles. Dialogues des morts.djvu/193

Cette page a été validée par deux contributeurs.


XI

XERXÈS ET LÉONIDAS


La sagesse et la valeur rendent les États invincibles, et non pas le grand nombre de sujets, ni l’autorité sans bornes des princes.


Xerxès. — Je prétends, Léonidas, te faire un grand honneur. Il ne tient qu’à toi d’être toujours à ma suite sur les bords du Styx.

Léonidas. — Je n’y suis descendu que pour ne te voir jamais et pour repousser ta tyrannie. Va chercher tes femmes, tes eunuques, tes esclaves et tes flatteurs ; voilà la compagnie qu’il te faut.

Xerxès. — Voyez ce brutal, cet insolent, un gueux qui n’eut jamais que le nom de roi sans autorité, un capitaine de bandits qui n’ont que la cape et l’épée ! Quoi ! tu n’as point de honte de te comparer au grand roi ? As-tu donc oublié que je couvrais la terre de soldats et la mer de navires ? Ne sais-tu pas que mon armée ne pouvait, en un repas, se désaltérer sans faire tarir des rivières ?

Léonidas. — Comment oses-tu vanter la multitude de tes troupes ? Trois cents Spartiates que je commandais aux Thermopyles furent tués par ton armée innombrable sans pouvoir être vaincus ; ils ne succombèrent qu’après s’être lassés de tuer. Ne vois-tu pas encore ici près ces ombres errant en foule qui couvrent le rivage ? Ce sont les vingt mille Perses que nous avons tués. Demande-leur combien un Spartiate seul vaut d’autres hommes,