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tout ce qui est beaucoup plus ancien que cette guerre. Les temps de la guerre de Troie, qui n’ont qu’environ six cents ans au-dessus de moi, sont encore des temps reconnus comme fabuleux. Jugez s’il faut s’étonner que la Chine ne soit pas bien assurée de ce grand nombre de siècles que ses histoires lui donnent avant votre temps.

Confucius. — Mais pourquoi auriez-vous inclination de croire que nous sommes sortis des Babyloniens ?

Socrate. — Le voici. Il y a beaucoup d’apparence que vous venez de quelque peuple de la haute Asie qui s’est répandu de proche en proche jusqu’à la Chine, et peut-être même dans les temps de quelque conquête des Indes, qui a mené le peuple conquérant jusque dans les pays qui composent aujourd’hui votre empire. Votre antiquité est grande ; il faut donc que votre espèce de colonie se soit faite par quelqu’un de ces anciens peuples, comme ceux de Ninive ou de Babylone. Il faut donc que vous veniez de quelque peuple puissant et fastueux, car c’est encore le caractère de votre nation. Vous êtes seuls de cette espèce dans tous vos pays ; et les peuples voisins, qui n’ont rien de semblable, n’ont pu vous donner ces mœurs. Vous avez, comme les anciens Babyloniens, l’astronomie, et même l’astrologie judiciaire, la superstition, l’art de deviner, une architecture plus somptueuse que proportionnée, une vie de délices et de faste, de grandes villes, un empire où le prince a une autorité absolue, des lois fort révérées, des temples en abondance, et une multitude de dieux de toutes les figures. Tout ceci n’est qu’une conjecture, mais elle pourrait être vraie.