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de tous côtés par des nations grossières ; il a certainement, depuis plusieurs siècles au-dessus de mon temps, des lois, une police et des arts que les autres peuples orientaux n’ont point eus. L’origine de notre nation est inconnue ; elle se cache dans l’obscurité des siècles les plus reculés. Vous voyez bien que je n’ai ni entêtement ni vanité là-dessus. De bonne foi, que pensez-vous sur l’origine d’un tel peuple ?

Socrate. — Il est difficile de décider juste ce qui est arrivé parmi tant de choses qui ont pu se faire et ne se faire pas, dans la manière dont les terres ont été peuplées. Mais voici ce qui me paraît assez naturel. Les peuples les plus anciens de nos histoires, les peuples les plus puissants et les plus polis, sont ceux de l’Asie et de l’Égypte : c’est là comme la source des colonies. Nous voyons que les Égyptiens ont fait des colonies dans la Grèce et en ont formé les mœurs. Quelques Asiatiques, comme les Phéniciens et les Phrygiens, ont fait de même sur toutes les côtes de la mer Méditerranée. D’autres Asiatiques de ces royaumes, qui étaient sur les bords du Tigre et de l’Euphrate, ont pu pénétrer jusque dans les Indes pour les peupler. Les peuples, en se multipliant, auront passé les fleuves et les montagnes, et insensiblement auront répandu leurs colonies jusque dans la Chine : rien ne les aura arrêtés dans ce vaste continent, qui est presque tout uni. Il n’y a guère d’apparence que les hommes soient parvenus à la Chine par l’extrémité du nord qu’on nomme à présent la Tartarie ; car les Chinois paraissent avoir été, dès la plus grande antiquité, des peuples doux, paisibles, policés et cultivant la