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même pour l’éloquence ; mais ce qui décide, c’est que tu es dans les enfers, à la merci de Pluton, que tu as irrité, et que je suis au rang des immortels dans le haut Olympe.




III

LE CENTAURE CHIRON ET ACHILLE


Peinture vive des écueils d’une jeunesse bouillante dans un prince né pour commander.


Achille. — À quoi me sert-il d’avoir reçu tes instructions ? Tu ne m’as jamais parlé que de sagesse, de valeur, de gloire, d’héroïsme. Avec tes beaux discours, me voilà devenu une ombre vaine ; ne m’aurait-il pas mieux valu passer une longue et délicieuse vie chez le roi Lycomède, déguisé en fille, avec les princesses filles de ce roi ?

Chiron. — Eh bien ! veux-tu demander au Destin de retourner parmi ces filles ? Tu fileras ; tu perdras ta gloire ; on fera sans toi un nouveau siège de Troie ; le fier Agamemnon, ton ennemi, sera chanté par Homère ; Thersite même ne sera pas oublié : mais pour toi, tu seras enseveli honteusement dans les ténèbres.

Achille. — Agamemnon m’enlever ma gloire ! moi demeurer dans un honteux oubli ! Je ne puis le souffrir, et j’aimerais mieux périr encore une fois de la main du lâche Pâris.