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d’Athènes ; et te retirant dans l’île de Scyros, Lycomède, qui savait combien tu étais accoutumé à faire des entreprises injustes, pour te prévenir, te précipita du haut d’un rocher. Voilà une belle fin !

Thésée. — La tienne est-elle plus honorable ? Devenir amoureux d’Omphale, chez qui tu filais ; puis la quitter pour la jeune Iole, au préjudice de la pauvre Déjanire à qui tu avais donné ta foi ; se laisser donner la tunique trempée dans le sang du centaure Nessus ; devenir furieux jusqu’à précipiter des rochers du mont Œta dans la mer le pauvre Lichas qui ne t’avait rien fait, et prier Philoctète en mourant de cacher ton sépulcre, afin qu’on te crût un dieu : cela est-il plus beau que ma mort ? Au moins, avant que d’être chassé par les Athéniens, je les avais tirés de leurs bourgs, où ils vivaient avec barbarie, pour les civiliser, et leur donner des lois dans l’enceinte d’une nouvelle ville. Pour toi, tu n’avais garde d’être législateur ; tout ton mérite était dans tes bras nerveux et dans tes épaules larges.

Hercule. — Mes épaules ont porté le monde pour soulager Atlas. De plus mon courage était admiré. Il est vrai que j’ai été trop attaché aux femmes ; mais c’est bien à toi à me le reprocher, toi qui abandonnas avec ingratitude Ariadne qui t’avait sauvé la vie en Crète ! Penses-tu que je n’aie point entendu parler de l’Amazone Antiope, à laquelle tu fus encore infidèle ? Églé, qui lui succéda, ne fut pas plus heureuse. Tu avais enlevé Hélène ; mais ses frères te surent bien punir. Phèdre t’avait aveuglé jusqu’au point qu’elle t’engagea à faire périr Hippolyte, que tu avais eu de l’Amazone. Plusieurs