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les hommes de les refaire. N’oubliez pas la comparaison du grain de blé qu’on sème dans la terre et qu’on fait pourrir, afin qu’il ressuscite et se multiplie. Au reste, il ne s’agit point d’enseigner par mémoire cette morale aux enfants, comme on leur enseigne le catéchisme ; cette méthode n’aboutirait qu’à tourner la religion en un langage affecté, du moins en des formalités ennuyeuses : aidez seulement leur esprit, et mettez-les en chemin de trouver ces vérités dans leur propre fonds ; elles leur en seront plus propres et plus agréables, elles s’imprimeront plus vivement : profitez des ouvertures pour leur faire développer ce qu’ils ne voient encore que confusément.

Mais prenez garde qu’il n’est rien de si dangereux que de leur parler du mépris de cette vie, sans leur faire voir, par tout le détail de votre conduite, que vous parlez sérieusement. Dans tous les âges, l’exemple a un pouvoir étonnant sur nous ; dans l’enfance il peut tout. Les enfants se plaisent fort à imiter ; ils n’ont point encore d’habitude qui leur rende l’imitation d’autrui difficile : de plus, n’étant pas capables de juger par eux-mêmes du fond des choses, ils en jugent bien plus par ce qu’ils voient dans ceux qui les proposent, que par les raisons dont ils les appuient ; les actions mêmes sont bien plus sensibles que les paroles : si donc ils voient faire le contraire de ce qu’on leur enseigne, ils s’accoutument à regarder la religion comme une belle cérémonie, et la vertu comme une idée impraticable.

Ne prenez jamais la liberté de faire devant les enfants certaines railleries sur des choses qui ont rapport à la religion. On se moquera de la dévotion de quelque esprit simple ; on rira sur ce qu’il consulte son confesseur, ou sur les pénitences qui lui sont imposées. Vous croyez que tout cela est innocent ; mais vous vous trompez : tout tire à conséquence en cette matière. Il ne faut