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lieu qu’ils se la représentent d’ordinaire comme quelque chose de triste et de languissant.

Outre l’avantage inestimable d’enseigner ainsi la religion aux enfants, ce fonds d’histoires agréables, qu’on jette de bonne heure dans leur mémoire, éveille leur curiosité pour les choses sérieuses, les rend sensibles aux plaisirs de l’esprit, fait qu’ils s’intéressent à ce qu’ils entendent dire des autres histoires qui ont quelque liaison avec celles qu’ils savent déjà. Mais, encore une fois, il faut bien se garder de leur faire jamais une loi d’écouter ni de retenir ces histoires, encore moins d’en faire des leçons réglées ; il faut que le plaisir fasse tout. Ne les pressez pas, vous en viendrez à bout, même pour les esprits communs ; il n’y a qu’à ne les point trop charger, et laisser venir leur curiosité peu à peu. Mais, direz-vous, comment leur raconter ces histoires d’une manière vive, courte, naturelle et agréable ? où sont les gouvernantes qui savent le faire ? À cela je réponds que je ne le propose qu’afin qu’on tâche de choisir des personnes de bon esprit pour gouverner les enfants, et qu’on leur inspire autant qu’on pourra cette méthode d’enseigner : chaque gouvernante en prendra selon la mesure de son talent. Mais enfin, si peu qu’elles aient d’ouverture d’esprit, la chose ira moins mal quand on les formera à cette manière, qui est naturelle et simple.

Elles peuvent ajouter à leurs discours la vue des estampes ou des tableaux qui représentent agréablement les histoires saintes. Les estampes peuvent suffire, et il faut s’en servir pour l’usage ordinaire : mais quand on aura la commodité de montrer aux enfants de bons tableaux, il ne faut pas le négliger ; car la force des couleurs, avec la grandeur des figures au naturel, frapperont bien davantage leur imagination.