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exemple, racontez l’histoire de Joseph : faites parler ses frères comme des brutaux, Jacob comme un père tendre et affligé ; que Joseph parle lui-même ; qu’il prenne plaisir, étant maître en Egypte, à se cacher à ses frères, à leur faire peur, et puis à se découvrir. Cette représentation naïve, jointe au merveilleux de cette histoire, charmera un enfant, pourvu qu’on ne le charge pas trop de semblables récits, qu’on les lui laisse désirer, qu’on les lui promette même pour récompense quand il sera sage, qu’on ne leur donne point l’air d’étude, qu’on n’oblige point l’enfant de les répéter : ces répétitions, à moins qu’ils ne s’y portent d’eux-mêmes, gênent les enfants, et leur ôtent tout l’agrément de ces sortes d’histoires. Il faut néanmoins observer que si l’enfant à quelque facilité de parler, il se portera de lui-même à raconter aux personnes qu’il aime les histoires qui lui auront donné plus de plaisir ; mais ne lui en faites point une règle. Vous pouvez vous servir de quelque personne qui sera libre avec l’enfant, et qui paraîtra désirer apprendre de lui son histoire : l’enfant sera ravi de la lui raconter. Ne faites pas semblant de l’entendre, laissez-le dire sans le reprendre de ses fautes. Lorsqu’il sera plus accoutumé à raconter, vous pourrez lui faire remarquer doucement la meilleure manière de faire une narration, qui est de la rendre courte, simple et naïve, par le choix des circonstances qui représentent mieux le naturel de chaque chose. Si vous avez plusieurs enfants, accoutumez-les peu à peu à représenter les personnages des histoires qu’ils ont apprises ; l’un sera Abraham et l’autre Isaac : ces représentations les charmeront plus que d’autres jeux, les accoutumeront à penser et à dire des choses sérieuses avec plaisir ; et rendront ces histoires ineffaçables dans leur mémoire.

Il faut tâcher de leur donner plus de goût pour les histoires saintes que pour les autres, non en leur disant qu’elles