ressources, et reviennent souvent de loin ; l’instruction est en eux un germe caché, qui pousse et qui fructifie quelquefois, quand l’expérience vient au secours de la raison, et que les passions s’attiédissent : au moins on sait par où on peut les rendre attentifs, réveiller leur curiosité ; on a en eux de quoi les intéresser à ce qu’on leur enseigne, et les piquer d’honneur ; au lieu qu’on n’a aucune prise sur les naturels indolents. Toutes les pensées de ceux-ci sont des distractions ; ils ne sont jamais où ils doivent être ; on ne peut même les toucher jusqu’au vif par les corrections ; ils écoutent tout, et ne sentent rien. Cette indolence rend l’enfant négligent, et dégoûté de tout ce qu’il fait. C’est alors que la meilleure éducation court risque d’échouer, si on ne se hâte d’aller au-devant du mal dès la première enfance. Beaucoup de gens, qui n’approfondissent guère, concluent de ce mauvais succès, que c’est la nature qui fait tout pour former des hommes de mérite, et que l’éducation n’y peut rien : au lieu qu’il faudrait seulement conclure qu’il y a des naturels semblables aux terres ingrates, sur qui la culture fait peu. C’est encore bien pire, quand ces éducations si difficiles sont traversées, ou négligées, ou mal réglées dans leurs commencements.
Il faut encore observer qu’il y a des naturels d’enfants auxquels on se trompe beaucoup. Ils paraissent d’abord jolis, parce que les premières grâces de l’enfance ont un lustre qui couvre tout ; on y voit je ne sais quoi de tendre et d’aimable, qui empêche d’examiner de près le détail des traits du visage. Tout ce qu’on trouve d’esprit en eux surprend, parce qu’on n’en attend point de cet âge ; toutes les fautes de jugement leur sont permises, et ont la grâce de l’ingénuité ; on prend une certaine vivacité du corps, qui ne manque jamais de paraître dans les enfants, pour celle de l’esprit. De là vient que l’enfance semble promettre tant, et qu’elle donne si peu. Tel a