Page:Fénélon - Oeuvres complètes, Tome XVII, 1830.djvu/59

Cette page n’a pas encore été corrigée

doit que leur offrir des ouvertures, un jour leur corps sera moins disposé à se remuer, et leur esprit agira davantage.

Le soin qu’on prendra cependant à assaisonner de plaisir les occupations sérieuses servira beaucoup à ralentir l’ardeur de la jeunesse pour les divertissements dangereux. C’est la sujétion et l’ennui qui donnent tant d’impatience de se divertir. Si une fille s’ennuyait moins à être auprès de sa mère, elle n’aurait pas tant d’envie de lui échapper pour aller chercher des compagnies moins bonnes. Dans le choix des divertissements, il faut éviter toutes les sociétés suspectes. Point de garçons avec les filles, ni mêmes des filles dont l’esprit ne soit réglé et sûr. Les jeux qui dissipent et qui passionnent trop, ou qui accoutument à une agitation de corps immodeste pour une fille, les fréquentes sorties de la maison, et les conversations qui peuvent donner l’envie d’en sortir souvent, doivent être évités. Quand on ne s’est encore gâté par aucun divertissement, et qu’on n’a fait naître en soi aucune passion ardente, on trouve aisément la joie ; la santé et l’innocence en sont les vraies sources : mais les gens qui ont eu le malheur de s’accoutumer aux plaisirs violents perdent le goût des plaisirs modérés, et s’ennuient toujours dans une recherche inquiète de la joie.

On se gâte le goût pour les divertissements comme pour les viandes, on s’accoutume tellement aux choses de haut goût, que les viandes communes et simplement assaisonnées deviennent fades et insipides. Craignons donc ces grands ébranlements de l’âme qui préparent l’ennui et le dégoût ; surtout ils sont plus à craindre pour les enfants, qui résistent moins à ce qu’ils sentent, et qui veulent être toujours émus : tenons-les dans le goût des choses simples ; qu’il ne faille pas de grands apprêts de viandes pour les nourrir, ni de divertissements pour