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Ce qui est le plus utile dans les premières années de l’enfance, c’est de ménager la santé de l’enfant, de tâcher de lui faire un sang doux par le choix des aliments, et par un régime de vie simple ; c’est de régler ses repas, en sorte qu’il mange toujours à peu près aux mêmes heures ; qu’il mange assez souvent à proportion de son besoin ; qu’il ne mange point hors de son repas, parce que c’est surcharger l’estomac pendant que la digestion n’est pas finie ; qu’il ne mange rien de haut goût qui l’excite à manger au-delà de son besoin et qui le dégoûte des aliments plus convenables à sa santé ; qu’enfin on ne lui serve pas trop de choses différentes, car la variété des viandes qui viennent l’une après l’autre soutient l’appétit après que le vrai besoin de manger est fini.

Ce qu’il y a encore de très important, c’est de laisser affermir les organes en ne pressant point l’instruction, d’éviter tout ce qui peut allumer les passions, d’accoutumer doucement l’enfant à être privé des choses pour lesquelles il a témoigné trop d’ardeur, afin qu’il n’espère jamais d’obtenir les choses qu’il désire.

Si peu que le naturel des enfants soit bon, on peut les rendre ainsi dociles, patients, fermes, gais et tranquilles : au lieu que, si on néglige ce premier âge, ils y deviennent ardents et inquiets pour toute leur vie ; leur sang se brûle ; les habitudes se forment : le corps, encore tendre, et l’âme, qui n’a encore aucune pente vers aucun objet, se plient vers le mal ; il se fait en eux une espèce de second péché originel, qui est la source de mille désordres quand ils sont plus grands. Dès qu’ils sont dans un âge plus avancé, où leur raison est toute développée, il faut que toutes les paroles qu’on leur dit servent à leur faire aimer la vérité, et à leur inspirer le mépris de toute dissimulation. Ainsi on ne doit jamais se servir d’aucune feinte pour les apaiser, ou pour leur persuader ce qu’on veut : par là, on leur