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d’un esprit plus étendu et plus attentif aux avantages d’un accommodement, et qu’enfin elles soient persuadées que la principale habileté dans les affaires est d’en prévoir les inconvénients, et de les savoir éviter.

Les filles qui ont une naissance et un bien considérables, ont besoin d’être instruites des devoirs des seigneurs dans leurs terres. Dites-leur donc ce qu’on peut faire pour empêcher les abus, les violences, les chicanes, les faussetés si ordinaires à la campagne. Joignez-y les moyens d’établir de petites écoles, et des assemblées de charité pour le soulagement des pauvres malades. Montrez aussi le trafic qu’on peut quelquefois établir en certains pays pour y diminuer la misère, mais surtout comment on peut procurer au peuple une instruction solide et une police chrétienne. Tout cela demanderait un détail trop long pour être mis ici. En expliquant les devoirs des seigneurs, n’oubliez pas leurs droits : dites ce que c’est que fiefs, seigneur dominant, vassal, hommages, rentes, dîmes inféodées, droit de champart, lods et ventes, indemnité, amortissement et reconnaissances, papiers terriers et autres choses semblables. Ces connaissances sont nécessaires, puisque le gouvernement des terres consiste entièrement dans toutes ces choses.

Après ces instructions, qui doivent tenir la première place, je crois qu’il n’est pas inutile de laisser aux filles, selon leurs loisirs et la portée de leur esprit, la lecture des livres profanes qui n’ont rien de dangereux pour les passions : c’est même le moyen de les dégoûter des comédies et des romans. Donnez-leur donc les histoires grecques et romaines ; elles y verront des prodiges de courage et de désintéressement. Ne leur laissez pas ignorer l’histoire de France, qui à aussi ses beautés ; mêlez celles des pays voisins, et les relations des pays éloignés judicieusement écrites. Tout cela sert à agrandir l’esprit, et à élever l’âme