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L’ESPOIR DE KUNDRY

Ce château enchanté n’est-il pas baigné d’une atmosphère de féerie ? N’en respire-t-on pas l’air dans cet étrange jardin ? Et ce jardin lui-même, ne le connaissons-nous pas ? N’a-t-il pas fleuri jadis dans l’île de Calypso, sur le rocher des Sirènes, et dans la terre des Lotophages ? Ne fut-il pas l’île Fortunée de la fée Morgane, sous la couronne printanière des pommiers en fleurs ? Il est le jardin des îles heureuses et des eldorados de rêve. Il entoure le palais d’Alcine, et charme celui d’Armide, bâti selon le style d’une rotonde de Palladio. Mais Parsifal repousse les Filles-Fleurs, et ne s’arrête qu’à la voix de Kundry prononçant le nom : Parsifal, dont jamais autre que sa mère ne le nomma. Kundry résume et achève toute la féerie, avec sa signification symbolique, avec sa portée philosophique et morale, et la victoire éternelle du christianisme sur le paganisme.

D’après la légende de Wagner, Kundry est une femme maudite qui, contrairement aux saintes femmes de Galilée, ne pleura pas en se trouvant sur le chemin de la grande victime du Calvaire, et se joignit à la foule odieuse et impie pour rire en voyant passer le Christ. Depuis, elle est une tentatrice, et, parfois, altérée de rédemption, elle se fait servante, elle aspire à servir la cause sacrée. Elle remplit un double rôle : pénitente et servante du bien, chez les chevaliers du Graal ; séductrice et esclave du mal, chez le magicien Klingsor. En obéissant aux puissances inférieures, aux puissances détestables d’une foule criminelle, elle a perdu, semble-t-il, la libre possession de son être ; elle est toujours au service d’une volonté étrangère ; elle subit une influence bonne ou mauvaise à laquelle elle ne résiste point, et