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CHAPITRE XVIII

LA FÉERIE DANS UN CERVEAU DU NORD : ANDERSEN


À Naples, à Venise, en France, en Allemagne, nous avons vu Basile, Gozzi, Perrault, les frères Grimm, recueillir de cent bouches populaires et anonymes la féerie éparse dans l’atmosphère d’un pays. Avec le conteur danois Andersen, le cas n’est plus tout à fait le même. Sans doute, dès son enfance, il écouta les fileuses le soir à la veillée ; il y a quelques réminiscences à travers son œuvre, mais son propre cerveau constitue à lui seul un monde de féerie. Les éléments recueillis, il les absorbe, les transforme, les refond à son image. Et il en suscite d’autres qu’il découvre, qu’il invente, qu’il met en jeu lui-même. Partout ailleurs la féerie semble résulter de la collaboration des peuples et des siècles ; ici, elle a ce caractère stupéfiant de paraître l’émanation d’un unique cerveau humain.

À quel homme étrange appartenait ce cerveau ? Quelles images s’y gravèrent dès le début ? C’est toute une histoire, qui ressemble elle-même à un mélancolique conte de fée.