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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

populaires ; ils s’étaient occupés de l’Edda, des chants héroïques du Danemark, des elfes islandais, des légendes allemandes. Les légendes allemandes, surtout, les passionnaient. Leur patriotisme se creusait un domaine dans le passé de leur race. C’est à ce sentiment que l’on doit l’incomparable recueil de contes donnant une gloire souriante au nom des austères érudits que furent les frères Grimm.

La moisson fut riche et variée, toute odorante d’une poésie aussi fraîche que la rosée du matin. Ils laissèrent à leur recueil un cachet de naïveté populaire ; et de même que le livre de Perrault, comme un miroir ingénu, reflète la France de Louis XIV, avec ses palais et ses chaumières, l’œuvre des frères Grimm, avec la limpidité d’un clair ruisseau, reproduit les détails familiers et l’humble rêverie d’un paysage allemand.

Les gnomes chers aux conteurs germaniques y mènent leur danse joyeuse, avec accompagnement de musique et de clair de lune, deux éléments indispensables à leur poésie nationale. Ces gnomes disparaissent quand minuit sonne à l’église d’un monastère voisin. Mais avant le coup de minuit, l’orfèvre et le tailleur dont le conte intitulé les Présents du Petit Peuple enferme l’étrange aventure, surprennent le bal fantastique. Les gnomes bourrent de charbon les poches des promeneurs, et le charbon se transforme en or. Ils étaient, ces gnomes, de minuscules personnages, toujours riant et chantant et méditant des malices. Dans le merveilleux des Grimm, les nains surgissent de toutes parts ; ils y sont beaucoup plus nombreux que les fées. Certains paraissent sortir d’une boîte de jouets de Nuremberg. Ils ont parfois des habits brodés, des meubles à leur