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LES FÉES DE LA FRANCE CLASSIQUE

leur royauté et leur beauté. Ce sont elles encore qui détiennent les anneaux merveilleux, qui les octroient à leurs favoris, qui donnent un conseil ou tirent la morale de quelque événement. Si Minerve n’était pas une déesse de la mythologie grecque, elle pourrait aussi bien être une fée tutélaire. Les fées que l’on évoque pour le duc de Bourgogne ne sont pas fantaisistes, elles sont morales et rationnelles ; elles ont toute la raison, toute la solidité, tout le jugement, tout le tact que le dix-septième siècle admira chez Mme de La Fayette ou Mme de Maintenon.


V

PERRAULT LIBÉRATEUR DES FÉES DE FRANCE


Malgré tout, les fées n’étaient pas encore officiellement sorties de leur disgrâce. Mais leur vengeur était né. Rien ne semblait devoir le prédisposer à son rôle. D’une famille bourgeoise, au tour d’esprit vif et original, il était né fort malin, irrévérencieux. Un de ses jeux d’enfance avait été de travestir l’Enéide et d’en composer une œuvre burlesque. Il ne demandait pas mieux que de rire au nez de l’Olympe, et il allait faire surgir du vieux sol gaulois toute une autre mythologie, beaucoup plus fantaisiste, beaucoup plus capricieuse, beaucoup plus humble, beaucoup plus familière, à laquelle il donnerait, avec un art ingénu et charmant, la patine du grand siècle. Ce libérateur des fées s’appelait Charles Perrault. Il fut d’abord un écolier fort avisé, fort espiègle, capable d’étude