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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

la maison se trouvait balayée, le ménage ordonné, comme par enchantement, et l’on reconnaissait l’œuvre nocturne des lutins familiers. Chaque toit possédait le sien. Ils étaient tout petits, portaient leur chevelure bouclée, et avaient pour vêtement le traditionnel manteau brun à capuchon qui durait des siècles, autant que leur propre vie, et dont il ne semblait pas bon de remarquer l’usure, même pour y remédier. Ils étaient fiers et susceptibles, comme de petits rois détrônés, et se vengeaient si la ménagère avare les privait de leur repas favori. L’Angleterre et l’Écosse, avec tous les jeux inattendus de leur lumière voilée sous leurs brumes perpétuelles, se prêtaient, semble-t-il, aux mirages fantastiques. Peut-être le cerveau de leurs habitants était-il aussi particulièrement disposé à accueillir le merveilleux. En Écosse, par exemple, combien de châteaux hantés, même de nos jours, et que de faits à enregistrer pour les annales d’un psychologue, tel que M. William James ! Certaines familles, d’après le romancier anglais Meredith, jugent de bon ton de posséder leur « ghost », c’est-à-dire leur revenant.


I


Parfois la féerie anglaise devenait suspecte. Elle fut compromise par quelques accusations de sorcellerie, confondue à deux reprises avec la magie noire. D’après François-Victor Hugo, Shakespeare aurait voulu la réhabiliter. Devons-nous croire si