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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

l’Arioste l’appelle une magicienne, est bien réellement une fée douée des attributs féeriques, y compris le don des métamorphoses, et nous transporte dans le monde des vieilles féeries médiévales, en nous apprenant que le tombeau est celui de l’enchanteur Merlin. L’esprit de Merlin demeure et plane sur cette tombe, car les bienheureux refusent de l’accueillir dans leur séjour. Cette grotte, explique Melissa, fut édifiée par Merlin lui-même. Une voix sort de sa tombe, prédisant les choses futures.

Les souvenirs classiques et chevaleresques se combinent entre eux dans le personnage de Melissa. Elle veille sur le tombeau de Merlin, elle évoque la vieille aventure qui mit l’enchanteur au pouvoir de la Dame du Lac ; elle fait apparaître aux yeux de Bradamante les héros de la maison d’Este qui, d’après la légende, seront ses descendants. Et Bradamante écoute Melissa célébrant la gloire de sa postérité, mais elle ne l’écoute pas plus attentivement, peut-être, que la marquise de Mantoue, dans les délicieuses retraites de sa grotte ou de son Paradiso, n’écoutera l’Arioste lui-même vantant l’illustre lignée de ses ancêtres, les princes et les dames de la maison d’Este.

Cette Melissa, le plus souvent, est l’auxiliaire de la raison, de la vertu, de l’amour légitime et fidèle. Ailleurs, elle se montre plus malicieuse et plus perfide que nous ne l’avions d’abord supposé : elle joue auprès d’un seigneur un personnage singulier, en voulant lui donner des soupçons sur la fidélité de sa femme, et l’engager à rompre la foi conjugale. Elle lui offre une coupe enchantée, où ne peuvent boire que les maris dont l’épouse est irréprochable. La première épreuve ayant affirmé la vertu de la