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PROLOGUE

entr’ouvriraient un cœur d’azur parmi des feuillages inoffensifs, et dont les chagrins ne franchiraient jamais le seuil. Ainsi devaient être les jardins au pays des Lotophages, où le vieil Homère nous raconte que les voyageurs, oubliant le retour, ne souhaitaient plus que demeurer et se nourrir d’une fleur… Et cependant le vieux Paganisme d’Homère, par une admirable intuition humaine, a senti qu’en de pareils jardins l’homme ne vivrait point sa vie complète et qu’il fallait les fuir, reprendre la lutte de la traversée amère, pour le but du rivage natal. Ainsi sommes-nous amenés à penser que les épines ne sont pas moins précieuses que les roses pour la beauté de la profonde vie humaine, et qu’au royaume des tulipes bleues, des lotus chargés d’oubli et des roses inoffensives, s’endormiraient ces hautes facultés de l’âme que la mission des épines est peut-être de tenir en éveil.


I


Les fées, disent les savants ouvrages qui traitent de ces personnes indécises, sont des divinités d’ordre inférieur, et qui forment un imposant cortège. Elles représentent un amalgame de souvenirs mythologiques.

En Égypte, elles eurent des aïeules, les Hâthors, au nombre de sept, comme les marraines de la Belle au Bois Dormant, — déesses à la face rosée et aux oreilles de génisse, toujours gracieuses, toujours souriantes, qui prédisaient aux nouveau-nés leur ave-