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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

Les damoiselles cherchèrent vainement à lui rendre la parole, et sa jeune belle-mère échoua comme elles. Cette jeune belle-mère renouvelle l’aventure de Phèdre et d’Hippolyte. Par dépit de se voir méprisée et selon le conseil d’une suivante, elle accuse Lucinien d’avoir voulu la déshonorer. Jugé, condamné, le pauvre prince est sur le point de périr, brûlé vif, quand apparaît un vieillard monté sur une mule blanche. Ce vieillard est un des sept sages. Il débite un conte, et le supplice retardé de Lucinien est remis au lendemain. Le lendemain, nouvelle apparition. Le second vieillard chevauche un âne espagnol. Il est également des sept sages, et, comme son prédécesseur, il a son histoire toute prête. Le supplice de Lucinien est encore retardé d’un jour. Ainsi défilent les sept sages, sept jours durant, chacun dégoisant son récit, et Lucinien échappe à la flamme jusqu’au huitième jour où paraît Virgile. Virgile raconte une dernière histoire ; il délie son élève de la promesse qui avait failli lui coûter la vie, et le jeune Lucinien s’explique, victorieux de ses accusatrices qui le remplaceront sur le bûcher. Il sera roi et se convertira au christianisme.

La plupart des contes semblent receler une sorte de plaidoyer indirect en faveur de Lucinien : c’est l’exemple du seigneur, qui, sous l’empire d’un accès de colère, tue le chien qui a sauvé son fils de la morsure du serpent ; l’anecdote du roi dont le trésor volé par deux chevaliers fut retrouvé par un aveugle ; le malheur du jeune Romain ayant sauvé son père, qui fut trahi par sa femme. Ne précipitez pas vos jugements, soyez en garde contre les fausses évidences, méfiez-vous de la malice des femmes, autant de préceptes cachés sous le tissu des folles aven-