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VOYAGE À VÉNUS

croissement que prenait le diamètre de la planète que j’allais visiter, je jugeai que je devais faire plusieurs centaines de lieues par seconde. En revanche, la Terre s’était réduite à mes yeux aux proportions d’une simple étoile, perdue dans l’éblouissante multitude d’astres qui brillaient autour de moi.


Je me sentis saisi d’un sentiment de triste humilité quand je vis combien c’était peu de chose dans l’univers que cette Terre pour laquelle il nous semble que tout ait été créé. — Ainsi, me disais-je, c’est sur ce globe presque imperceptible, ou plutôt sur une de ses parties (car l’eau en couvre les trois quarts) que s’agitent des millions de petits êtres qui se proclament les rois de la création… Chétives créatures, qui ne peuvent même pas couler dans une paix fraternelle la courte vie que Dieu leur a permise sur ce grain de sable, et qui la consument méchamment à s’exploiter et à se déchirer les uns les autres. Peuples formant un État, ils s’efforcent de duper leurs voisins en mettant en œuvre les fourberies des scapins diplomatiques, quand ils ne tentent pas, sous de futiles prétextes, de s’emparer à main armée de leur territoire. Particuliers, leur souci perpétuel est d’acquérir la fortune et les distinctions, beaucoup moins pour en jouir que pour