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VOYAGE À VÉNUS

rent en masses noirâtres et profondes, comme pour livrer bataille à la terre, et bientôt, en effet, grondèrent dans leurs flancs des bruits sourds et menaçants. Un coup de foudre qu’elles lancèrent sur une des plus hautes montagnes, comme sur un fort de défense, ouvrit l’attaque, et aussitôt après elles envoyèrent une effroyable bordée de balles de glace qui ravagèrent, sans merci, les vignes et les moissons.

Ce ne fut pas, comme bien vous pensez, sans une vive appréhension, que je pénétrai dans le foyer même de la tempête. Dès la première couche de nuages, je me trouvai dans une obscurité profonde. Des vapeurs fuligineuses et pareilles à l’épaisse fumée de la houille m’entouraient de toutes parts, seulement, de temps à autre, l’éclair de la foudre y projetait une lueur d’un rouge sinistre, et en faisait ces ténèbres visibles que Milton a placées dans son enfer. Quelle que fût la rapidité de mon ascension, je voyageai dans ces masses caligineuses bien plus longtemps que je ne l’aurais pensé. Elles me parurent avoir au moins cinq lieues d’épaisseur, comme ce nuage que MM. Barral et Bixio traversèrent dans leur voyage aérostatique, et j’éprouvai une grande satisfaction lorsque enfin une clarté bien faible et bien confuse encore, mais devenant