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VOYAGE À VÉNUS

gion qu’on a voulu lui imposer. Quelques livres et quelques instituteurs eussent fait bien davantage.

Je goûtai volontiers ces réflexions de Mélino. Sans doute, autant qu’un autre, j’admire le fier courage d’une nation qui lutte contre le despotisme absolu de son souverain ou contre l’oppression que lui fait subir le chef d’un empire voisin, qui la possède par ce qu’on est convenu d’appeler droit de conquête. Mais dans ces tristes luttes, la victoire finit malheureusement par appartenir à la force matérielle, et la masse écrasante d’une milice brutale l’emporte hélas ! presque toujours, sur le dévouement de quelques cœurs héroïques. Il n’en est pas ainsi des révolutions produites par les idées : leur marche est plus lente, mais aussi plus assurée, et pure au moins de larmes et de sang. Vous vous rappelez Phébus et Borée, la charmante fable de La Fontaine. Phébus et Borée s’efforcent de dépouiller un voyageur de son manteau ; Borée commence à souffler avec frénésie :

 

Notre souffleur à gage
Se gorge de vapeurs, s’enfle comme un ballon,
Fait un vacarme de démon,
Siffle, souffle, tempête, et brise en son passage
Maint toit qui n’en peut mais, fait périr maint bateau…