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VOYAGE À VÉNUS

sions dont notre sexe s’arroge ici l’apanage exclusif, et l’on n’y traite pas dédaigneusement de bas-bleus celles qui cultivent les lettres et ne sont pas tout à fait ignorantes sur les questions sociales ou politiques.

Je m’aperçus de la profonde différence de ces mœurs avec les nôtres dès le commencement de la soirée, et, le premier mouvement de surprise évanoui, je trouvai que cette façon d’admettre la femme à partager les plus sérieuses préoccupations et les plus nobles travaux de l’homme était pour elle un hommage bien plus sérieux et bien plus élevé que cette galanterie banale qui consiste à la traiter en enfant gâtée, et à murmurer éternellement à son oreille : — « Que vous êtes jolie, que vous me semblez belle ! » car l’imagination de nos céladons n’est jamais allée au-delà de la fable du Renard et du Corbeau.


Ce qui me surprit encore, dans cette soirée, ce fut la présence d’ouvriers que j’avais vus travailler chez Mélino.

— Comment ! lui dis-je à voix basse, vous recevez vos ouvriers ?

— Cela doit vous étonner en effet, répondit-il en souriant, car c’est tout à fait contraire à vos préju-

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