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VOYAGE À VÉNUS

des chapelières, des employées de bureau, de magasin ; des femmes qui pratiquent le droit, la médecine… Vous riez, mais demandez-vous plutôt pour quelle raison il n’en serait pas ainsi. Restreindre les occupations honnêtes qu’elles peuvent aborder à de simples travaux de couture, qui sont si peu lucratifs et que l’invention des machines à coudre achève de déprécier, n’est-ce pas les obliger à demander au vice le pain que le travail ne peut leur donner ? Pour celles-mêmes qui sont à l’abri du besoin, la longue oisiveté dans laquelle on les relègue n’a-t-elle pas ses périls, et ne laisse-t-on pas ainsi leur esprit prendre trop souvent la volée vers les tièdes et fiévreuses régions de la rêverie sentimentale ? Sous un autre point de vue, n’est-il pas un peu blessant pour leur dignité de déclarer presque toutes les professions inaccessibles à leur capacité, comme si leur aptitude manuelle ne pouvait s’élever au-dessus de quelques travaux de tapisserie, et leur intelligence au-dessus d’un caquetage futile sur les ridicules de leurs amies et les prescriptions de la mode nouvelle ?


Comme il me parlait ainsi, je vis un certain nombre d’ouvriers sortir du même établissement.